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  • Publication Unafo

Après 15 ans d’existence, les SIAO continuent de renforcer leur rôle central au niveau des territoires. Si le Logement Accompagné est de plus en plus intégré à leur fonctionnement, des modalités de coopération plus efficientes restent encore à structurer.

 

 

Une plateforme unique pour coordonner et réguler les secteurs de l’accueil, de l’hébergement et de l’accompagnement vers l’insertion et le logement des personnes sans domicile : c’est en ces termes que la loi ALUR consacrait en mars 2014 le rôle des Services intégrés de l’accueil et de l’orientation (SIAO), créés 4 ans auparavant. Si dans un premier temps le dispositif s’est concentré sur l’organisation du volet « hébergement », les acteurs du logement accompagné n’ont pas ménagé leurs efforts pour s’intégrer aux nouvelles dynamiques locales.

« Quand on parle d’orientation et d’accompagnement vers le logement, le Logement Accompagné est forcément impacté par les décisions prises par les territoires », rappelle Pauline Lebeau, chargée de mission à l’Unafo. « Si la création des SIAO Insertion est la preuve que l’État est bien décidé à renforcer la fluidité entre hébergement et logement, les adhérents de l’Union nous font encore régulièrement part de leurs difficultés à trouver leur place au sein des SIAO et à faire comprendre les spécificités de leurs structures auprès de leurs interlocuteurs ».

Des réflexes qui s’installent

Si certains gestionnaires ne sont pas encore pleinement impliqués dans la dynamique des SIAO, les lignes bougent sur le terrain. Et de la même manière que l’État a désormais intégré le rôle essentiel joué par les résidences sociales dans la politique du Logement d’abord, de plus en plus de SIAO tendent la main aux acteurs du Logement Accompagné. À Paris par exemple, le SIAO 75 a étoffé ses équipes ces dernières années pour renforcer le travail avec les gestionnaires, et le protocole signé en 2014 par l’Unafo, la DRIHL et l’URHAJ a été renouvelé en janvier 2022 afin d’aller encore plus loin dans la collaboration et améliorer les admissions sur les contingents de l’État.

« Il y a deux ans, tout le monde se regardait en chien de faïence », se souvient Thierry de Monterno, Directeur d’exploitation d’Hénéo. « Les dossiers qui nous étaient adres-sés ne nous correspondaient pas et nous en refusions plus de 50 %. Depuis, nous avons appris à discuter ensemble. Les orienta-tions sont devenues mieux ciblées, plus pertinentes. Et de notre côté, nous avons aussi une meilleure compréhension des objectifs et des contraintes du SIAO ».

Nous partageons avec les SIAO les mêmes objectifs de réduction de la vacance et de fluidification des parcours résidentiels.

Thierry de Monterno

En l’espace de deux ans, Hénéo a ainsi vu son taux de reprise divisé par deux. Du côté du SIAO 75, des référents ont été désignés pour chaque dispositif du Logement Accompagné, afin de renforcer encore la connaissance des spécificités du secteur.

Des professionnels et des outils

Dans le Nord, les acteurs locaux comme Aréli doivent s’adapter, avec des SIAO de taille et d’organisation différentes, ce qui ne facilite pas l’homogénéisation des pratiques. « Entre le SIAO de l’arrondissement de Lille, qui gère le territoire de la Métropole Européenne de Lille, et celui de Dunkerque qui fonctionne en circuit plus court, nous avons deux expériences complètement différentes », confirme Lydie Renard, Directrice des projets et services résidentiels

La Métropole Européenne de Lille était d’ailleurs l’un des territoires choisis en 2020 par les ALI pour mener une recherche-action avec l’ANSA*. La démarche avait pour but d’interroger la collaboration entre gestionnaires et SIAO, et d’aborder toutes les questions sensibles – de la gestion en flux jusqu’au SI SIAO.

« Ce travail nous a permis de comprendre que ce que nous prenions pour des orientations venant de l’hébergement étaient en fait des personnes fléchées par les SIAO, ça a été une révélation pour nous », reprend Lydie Renard. « Nous avons également pu faire entendre que nous ne voulions pas d’une gestion en stock peu adaptée à nos structures où il y a beaucoup de rotation. Et surtout, pourquoi limiter notre collaboration à 25 % du parc alors que l’on peut répondre à plus de publics prioritaires des contingents de l’État ? Rien qu’en 2021, plus de 70 % de nos attributions étaient sur ces publics ».

Si le dialogue est désormais plus facile, la question du système d’information des SIAO (SI-SIAO) reste une épine dans le pied des gestionnaires et des SIAO eux-mêmes car l’outil n’a pas été pensé pour le Logement Accompagné – avec des problèmes de doubles saisies, de données non-visibles par certains utilisateurs… La situation est d’autant plus paradoxale que si le SI est central dans le travail avec le SIAO de Lille, ce n’est absolument pas le cas à Dunkerque ou à Paris.

« Toute la spécificité de notre travail, c’est l’équilibre social de nos résidences », conclut Thierry de Monterno. « Pourquoi à un moment nous allons pouvoir accepter un profil, et la fois d’après refuser le même type de profil sur le même site ? C’est cette finesse d’appréciation que nous devons réussir à faire comprendre à nos interlocuteurs ». Une finesse pas toujours compatible avec la raideur informatique, et qui devra aussi s’appuyer sur des équipes stables – une gageure tant les SIAO, comme l’ensemble des acteurs du social, peinent à recruter ces derniers temps.

Il y a une réelle volonté d’avancer ensemble dans une relation saine et collaborative.

Lydie Renard – Aréli

Cet article est à retrouver dans le numéro 65 d’Action Habitat