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Entretien avec Virginie Lasserre, DGCS

Dans le cadre de notre magazine Action habitat, Virginie Lasserre, directrice générale de la cohésion sociale, revient sur les missions du SIAO et les enjeux à venir.

Les SIAO fêtent leurs 10 ans : quel regard portez-vous sur leur évolution, les objectifs de départ et leur rôle sur le terrain ?

©Mathieu DelmestreLes SIAO ont pour rôle de traiter les demandes d’hébergement des personnes sans domicile et d’organiser un processus d’attribution des places, dans une optique de respect des principes de continuité et d’inconditionnalité de l’accueil. La régulation et la coordination en sont des leviers essentiels.

Pour ce qui est de la régulation de l’offre d’hébergement : les objectifs nous semblent atteints. La mise en œuvre des SIAO simplifie l’accès à l’hébergement et garantit un traitement équitable des demandeurs, les SIAO centralisent la quasi-intégralité des places et des demandes. Les admissions directes et les refus de prise en charge par les structures sont devenus minoritaires.

Pour ce qui est du logement adapté, la centralisation des places par le SIAO a bien progressé mais n’est pas exhaustive, les structures concernées n’utilisent pas toutes SI SIAO et nous constatons encore régulièrement des refus d’admission. Des échanges soutenus sont organisés avec l’ensemble des représentants du secteur afin de fluidifier les processus et d’améliorer le partage d’informations entre les différents acteurs de terrain.

Avec le déploiement de la politique du logement d’abord : le périmètre d’action des SIAO s’est progressivement étendu : de l’hébergement d’urgence au logement adapté, puis au logement.

Cette évolution nécessite une mobilisation renforcée des acteurs de la chaîne de la rue au logement. Aussi pour permettre aux SIAO de faire face à l’augmentation de la charge de travail et de créer 150 nouveaux postes (ETP) déployés sur l’ensemble du territoire national, l’Etat a renforcé en 2021 son soutien aux SIAO pour un montant de plus de 8 millions d’euros en plus des 50 millions qui leur sont déjà consacrés annuellement.

Comment s’assurer que le Logement Accompagné soit pleinement intégré dans les SIAO ?

Comme le souligne l’enquête menée à l’automne 2019 par l’Agence nouvelle des solidarités actives (ANSA) en partenariat avec la DGCS, les SIAO conservent une marge de progression importante concernant le recensement de l’offre de logement adapté : 78 % des SIAO recensent toutes les places de pensions de familles. En revanche, seulement un quart des SIAO recense l’ensemble des places de résidences sociales (22% n’en recensant aucune). De nombreux SIAO rencontrent encore des difficultés à mobiliser les opérateurs pour avoir des données complètes et actualisées sur l’offre disponible.

Ces dernières années, les directives nationales engagent les services déconcentrés de l’Etat à porter une attention forte sur le recensement par les SIAO de la totalité des offres de logement accompagné (pensions de familles, IML, résidences sociales, etc.).

Par ailleurs, de nouveaux développements informatiques pour le SI du SIAO sont envisagés en 2021, facilitant l’intégration automatisée de ces places. Des travaux ont été engagés avec plusieurs opérateurs pour étudier les modalités d’intégration « en masse » de leur patrimoine au SI-SIAO, et la gestion de sa mise-à-jour (résidences sociales, foyers de travailleurs migrants, pensions de famille). Les besoins en interfaçage seront examinés, pour faciliter l’échange de données.

Comment éviter que le SI-SIAO, outils complexe, ne vienne ralentir la bonne marche du dispositif ?

La nouvelle version du SI SIAO est dans l’absolu un outil beaucoup plus performant que l’ancienne: la sécurité des données et des utilisateurs est renforcée, les données personnelles mieux protégées, l’ergonomie améliorée et de nouvelles fonctionnalités sont disponibles. Ainsi par exemple, les deux volets, autrefois séparés, de la gestion de l’hébergement d’urgence et de l’insertion ont été réunis assurant une plus grande simplicité et fluidité du passage de l’un à l’autre.

Cependant le passage à cette nouvelle version s’est accompagnée de trop nombreux bugs : leur correction complète est la priorité des équipes en charge du SI SIAO, qui ont déjà avancé et réglé une grande partie des difficultés. Nous continuons de recevoir des demandes de correction et notre dispositif de réponse est toujours mobilisé. Nous travaillons en étroite collaboration avec les SIAO pour identifier et prioriser les corrections restant à mener, et pour les aider à prendre en main cette nouvelle version.

Enfin, de nouvelles fonctionnalités seront développées dès que nous en aurons fini avec la correction des dysfonctionnements, et elles devraient faciliter les missions des SIAO : une interface avec SYPLO, un outil amélioré pour les maraudes, des interfaces avec certains hébergeurs (notamment ADOMA). Les SIAO eux-mêmes ont formulé un certain nombre de demandes d’évolutions qui seront prises en compte pour les plus significatives d’entre-elles. Notons par exemple les nombreuses demandes d’ergonomie permettant d’avoir des liens directs à partir des consultations ou d’amélioration des tris d’affichages permettant d’accéder plus rapidement à l’information. Ou en ce qui concerne les maraudes, la demande d’optimiser la saisie lors des sorties pour permettre une prise en charge plus rapide ou encore des demandes d’amélioration des orientations pour y apporter plus de souplesse et de possibilités.

Comment aller encore plus loin dans la cohésion et la coopération de l’ensemble des acteurs d’un même territoire ?

Les SIAO ont gagné en reconnaissance et paraissent bien identifiés par les acteurs œuvrant dans le champ de la lutte contre la précarité.

Ces partenariats, qui restent principalement informels, visent à mobiliser l’ensemble des dispositifs nécessaires pour les personnes sans domicile : accompagnement social, suivi sanitaire, insertion vers l’emploi etc. Pour favoriser l’accès au logement des personnes qui en sont les plus éloignés, des partenariats plus poussés doivent se développer avec les collectivités territoriales et les bailleurs. Ces liens doivent se structurer autour du préfet, compétent en matière d’urgence sociale, et notamment dans le cadre du plan départemental pour l’accès au logement et à l’hébergement des personnes défavorisées, le fameux PDALHPD.

 

Crédit photo : © Mathieu Delmestre